Droit commercial

Droit des contrats, Droit commercial

La cession de créance un recours contre les impayés !

Dans la vie des affaires, l’impact de plusieurs impayés peut être notable sur la trésorerie de l’entreprise et entraîner des ralentissements dans la mise en œuvre de nouveaux projets, voire mener à l’ouverture d’une procédure collective. La cession de créance permet aux entreprises de pallier un éventuel impayé en cédant la créance à un tiers, assurant ainsi un paiement, certes moindre, mais sûr. Le cessionnaire (l’acheteur) de la créance poursuivra ainsi le recouvrement de la créance comme l’aurait fait le cédant. Le cadre de la cession de créance La cession de créance est régie par les articles 1321 à 1326 du Code civil qui constituent son socle législatif. Afin d’être valide, une telle cession doit être : Le débiteur doit avoir connaissance de la cession de créance afin que celle-ci lui soit opposable. Le débiteur peut simplement consentir à la cession, en prendre acte ou être averti par notification. La cession de créance doit impérativement mentionner la date à laquelle elle est effectuée. La date permet de rendre la cession opposable aux tiers et permet, en cas de concours entre cessionnaires, de déterminer le premier cessionnaire en date. Le cédant doit garantir au cessionnaire l’existence de la créance et de ses accessoires en vertu de l’article 1326 du Code civil. Les accessoires d’une créance s’entendent des différents droits ou sûretés qui en garantissent le paiement, tels que les intérêts, les pénalités ou encore les hypothèques. Le cédant ne répond pas, par principe, de la solvabilité du débiteur, mais il peut néanmoins s’y engager. En pareil cas, il devra indemniser le créancier en cas d’insolvabilité du débiteur. Cette opération est à distinguer de l’affacturage, qui repose sur le mécanisme de la subrogation. Les clauses à insérer au sein de la cession de créance Afin de sécuriser l’opération, il est recommandé d’insérer certaines clauses au sein de la cession de créance. Cette clause est extrêmement importante en ce qu’elle va définir et identifier clairement les créances faisant l’objet d’une cession. Les parties devront distinguer chaque créance, en cas de cession de plusieurs créances, les intérêts éventuellement échus ou encore la nature de la créance. La clause précisera en outre les éventuels accessoires de la créance (cautionnement, hypothèque…). La clause de notification permet de s’assurer du bon accomplissement des formalités concernant le débiteur et de l’opposabilité de la cession à son encontre. Il est également possible de prévoir laquelle des parties devra accomplir cette obligation d’information envers le débiteur et qui en supportera les coûts. Cette clause vise à pallier les conséquences d’une éventuelle défaillance du débiteur en faisant supporter ou non au cédant l’impayé que pourrait connaître le cessionnaire. Cette clause peut venir limiter le montant à un plafond, prévoir une somme forfaitaire ou prévoir un remboursement intégral. Le contrat peut prévoir une clause pénale fixant une somme forfaitaire versée en cas de non-respect des obligations de l’une ou l’autre des parties. Bien structurée, la cession de créance devient ainsi un levier efficace de protection contre les défaillances de paiement et de sécurisation de la trésorerie.

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Entretien des locaux loués : comment rédiger les clauses d’entretien sans méconnaître l’obligation de délivrance conforme ?

La conclusion d’un contrat de bail, peu importe sa nature, fait naître à l’encontre du bailleur une obligation de délivrance. Prévue à l’article 1719 du Code civil, cette obligation impose au bailleur de : En matière de baux commerciaux, il est parfois fréquent que le bailleur souhaite limiter son obligation d’entretien. Ces clauses, qui parfois exonèrent totalement le bailleur de toute obligation, ont été sujettes à un fort contentieux. Le refus d’exonération du bailleur de son obligation de délivrance conforme L’obligation de délivrance conforme du bailleur fut rapidement considérée comme une obligation essentielle du bail, à laquelle le bailleur ne saurait valablement se soustraire par le biais d’une stipulation contractuelle. Ainsi, une clause déclarant que le preneur fera son affaire personnelle des dégâts causés aux lieux loués ne saurait valablement exonérer le bailleur de procéder aux réparations rendues nécessaires par les vices affectant la structure de l’immeuble (Cass. Civ 3e, 26 janvier 2022, n°18-23.578, 18-24.065, 18-24.944). Dans la même veine, il a pu être jugé, pour des infiltrations d’eau, que : « Une clause de non-recours, qui n’a pas pour objet de mettre à la charge du preneur certains travaux d’entretien ou de réparation, n’a pas pour effet d’exonérer le bailleur de son obligation de délivrance » (Cass. Civ 3e, 10 avril 2025, n°23-14.974). Plus généralement, la jurisprudence prohibe les clauses mettant à la charge du preneur les travaux relevant de la structure de l’immeuble (Cass. Civ 3e, 2 juillet 2013, n°11-28.496). En pareil cas, le preneur pourra valablement invoquer l’obligation de délivrance du bailleur afin qu’il prenne en charge tout ou partie des travaux et, le cas échéant, qu’il indemnise son locataire pour les pertes occasionnées. Il convient également de préciser que l’article R. 145-35 du Code de commerce vient notamment lister les dépenses ne pouvant être imputées au locataire. Les aménagements contractuels de l’obligation de délivrance conforme Si l’insertion de clauses aménageant la répartition de l’entretien des locaux entre les parties est restreinte, la jurisprudence tolère néanmoins leur existence en encadrant fermement les possibilités des cocontractants. Elle admet notamment l’existence de ces clauses lorsqu’elles concernent des travaux ne relevant pas de la structure de l’immeuble. Tel est par exemple le cas pour une clause imputant l’entretien de la climatisation au preneur (Cass. Civ 3e, 28 septembre 2022, n°21-20.879). Il sera ainsi possible de mettre à la charge du preneur l’entretien de certains éléments d’équipement si ceux-ci ne font pas partie de la « structure de l’immeuble ». Cette tolérance est toutefois interprétée strictement et ne devra pas vider de sa substance l’obligation de délivrance du bailleur. Quid de la rédaction des clauses ? In fine, lors de la rédaction du contrat de bail commercial, le bailleur devra donc s’attacher à respecter son obligation de délivrance. Si l’article R. 145-35 du Code de commerce peut fournir une première piste, il faudra que les stipulations soient : Seront ainsi à proscrire les clauses trop générales ne détaillant pas précisément les travaux mis à la charge du preneur. En la matière, il convient donc de laisser le minimum d’interprétation possible afin que la clause ne dénature pas l’obligation de délivrance et ne soit pas privée d’effets. Il est fortement recommandé, pour la rédaction d’un contrat de bail commercial, de solliciter un avocat afin d’envisager les différentes possibilités contractuelles. Un cabinet tel que PANTHÉON AVOCATS est rompu à la pratique des baux commerciaux et pourra vous épauler tant en conseil qu’en contentieux.

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Exercice du droit d’option par le bailleur : pas d’exigence formelle selon la Cour de cassation

Le 27 mars 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt significatif concernant l’exercice du droit d’option par le bailleur en matière de baux commerciaux (RG n° 23-20.030). Cette décision réaffirme les exigences formelles applicables à l’exercice de ce droit, en précisant que les mentions obligatoires prévues par l’article L. 145-9 du code de commerce ne concernent que le congé délivré par le bailleur, et non l’exercice de son droit d’option. Ainsi, le bailleur, lorsqu’il exerce son droit d’option, n’est pas tenu de respecter des conditions de forme particulières, ni d’inclure des mentions spécifiques telles que le délai de prescription pour contester cette décision ou une motivation explicite. Contexte de l’affaire Dans cette affaire, M. [O] était locataire de locaux commerciaux appartenant à la Société civile immobilière [P] (la bailleresse). Après avoir sollicité le renouvellement de son bail, la bailleresse a, dans un premier temps, proposé un nouveau loyer, puis a finalement exercé son droit d’option en refusant le renouvellement du bail. Le locataire a contesté cette décision en justice, invoquant notamment l’absence de certaines mentions obligatoires dans la notification du refus de renouvellement. Décision de la Cour de cassation La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du locataire, confirmant ainsi la décision de la cour d’appel. Elle a jugé que les exigences formelles prévues par l’article L. 145-9 du code de commerce s’appliquent exclusivement au congé délivré par le bailleur, et non à l’exercice de son droit d’option. Par conséquent, le bailleur n’est pas tenu de respecter des conditions de forme spécifiques ni d’inclure des mentions particulières, telles que le délai de prescription pour contester la décision, ou encore de motiver sa décision, lorsqu’il exerce son droit d’option. Implications pratiques Pour les bailleurs comme pour leurs conseils, cette décision sécurise une pratique : le droit d’option peut être exercé librement, sans formalisme particulier, ce qui allège les contraintes procédurales pesant sur le bailleur. Côté preneur, en revanche, il est essentiel de rester vigilant : une lettre de refus de renouvellement, même succincte, peut être parfaitement valable si elle s’inscrit dans l’exercice du droit d’option du bailleur. In fine, cette décision confirme une lecture souple du droit d’option et participe à la stabilité attendue en matière de baux commerciaux. Elle illustre la volonté de la Cour de cassation de ne pas étendre artificiellement les exigences formelles prévues pour les congés à d’autres actes du bailleur, dans une logique de sécurité juridique.

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Agent commercial : Q&A

La qualité d’agent commercial correspond à un statut particulier qui soulève régulièrement de nombreuses questions. Tour d’horizon des questions les plus fréquentes : Qu’est-ce qu’un agent commercial ? Défini par le Code de commerce comme un mandataire indépendant chargé de manière permanente de négocier et éventuellement de conclure, au nom et pour le compte du mandant, des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services. Cette définition permet de dresser le portrait de l’agent commercial lequel est un professionnel dont la mission est de représenter un ou plusieurs mandants (entreprise, commerçant, etc.) de manière indépendante et donc hors du cadre d’un contrat de travail, ce qui exclut tout lien de subordination. L’agent commercial peut-il avoir des employés ou déléguer sa mission ? L’agent commercial est un professionnel indépendant et, en tant que tel, demeure libre de son organisation. Il peut, par exemple, recruter du personnel salarié ou mandater lui-même des sous-agents commerciaux. Attention toutefois, certains contrats d’agence incluent une clause « intuitu personae » qui oblige le mandataire à agir en personne. En tout état de cause, il faut garder à l’esprit que l’agent reste seul responsable à l’égard du mandant de l’action de ses salariés et sous-agents. Quelles formalités faut-il remplir pour devenir agent commercial ? Avant de commencer son activité, l’agent commercial a l’obligation de s’immatriculer au Registre Spécial des Agents Commerciaux (RSAC). Par ailleurs une fois l’immatriculation réalisée, l’agent commercial demeure soumis à une obligation de déclaration s’agissant de tout fait de nature à modifier les mentions figurant dans ladite immatriculation. Existe-t-il des incompatibilités professionnelles avec la qualité d’agent commercial ? Plusieurs professions sont exclues de la qualité d’agent commercial, on retrouve ainsi les agents de voyage, les mandataires de l’assurance, les intermédiaires en opération de banque et conseillers en investissement financiers, etc. Sous quelle forme exercer l’activité d’agent commercial ? L’agent commercial peut être une personne physique entrepreneur individuel ou micro entrepreneur s’il respecte les conditions de ce statut, ou encore une société. Il convient de noter qu’exercer son activité en tant que personne physique permet à l’agent commercial ou ses ayants droit d’obtenir, en cas de cessation de contrat due à l’âge, l’infirmité, la maladie ou le décès de l’agent commercial, une indemnité de cessation de contrat. Quelles solutions pour protéger mon patrimoine si je choisis d’exercer en tant qu’entrepreneur individuel ? Il existe plusieurs solutions afin de protéger son patrimoine. D’une part, tout entrepreneur individuel a la possibilité de déclarer insaisissables ses biens fonciers non affectés à son activité professionnelle. D’autre part, depuis le 1er janvier 2011 la loi a créé le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) qui permet de constituer un patrimoine professionnel séparé du patrimoine personnel, les créanciers professionnels ne pouvant saisir que le patrimoine professionnel.

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Dol du mandataire et responsabilité civile, attention à la faute du mandant

La Cour de cassation a eu à trancher la question de savoir si la responsabilité civile du mandant était engagée du fait des manœuvres dolosives de son mandataire. Après avoir rappelé que la victime d’un dol est fondée à agir, au choix, en nullité de la convention sur le fondement des articles 1137 et 1178 du Code civil ou en réparation du préjudice sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, la Cour précise que : « Si le mandant est, en vertu de l’article 1998 du code civil, contractuellement responsable des dommages subis du fait de l’inexécution des engagements contractés par son mandataire dans les limites du mandat conféré, les manœuvres dolosives du mandataire, dans l’exercice de son mandat, n’engagent la responsabilité du mandant que s’il a personnellement commis une faute, qu’il incombe à la victime d’établir. » En l’espèce, les victimes du dol avaient renoncé à solliciter la nullité de l’acte litigieux pour limiter leur demande à des dommages-intérêts. La Cour de cassation prend position et refuse d’engager la responsabilité du mandant en l’absence de toute faute personnelle de ce dernier. La présente décision se comprend au regard de la nature même du dol, lequel présente deux aspects distincts et complémentaires : d’un côté, le dol apparaît comme un vice du consentement ; d’un autre côté, le dol apparaît comme un délit civil. Or, aux termes de l’article 1138 du Code civil, le dol est constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant ou encore lorsqu’il émane d’un tiers de connivence. Ainsi, la question posée par le pourvoi revient à se demander si admettre la nullité d’un contrat sur le fondement du dol commis par le représentant du contractant implique nécessairement d’admettre la responsabilité civile du mandant du fait des manœuvres dolosives du mandataire ? Ou, au contraire, faut-il, pour que le mandant soit condamné à des dommages-intérêts envers le cocontractant, qu’il ait lui-même commis une faute, ou à tout le moins l’un des faits générateurs de responsabilité civile prévus par les articles 1382, devenu 1240, et suivants du code civil ? La Cour de cassation tranche cette question et répond par l’affirmative : la responsabilité civile du mandant ne peut être engagée que s’il a personnellement commis une faute. Il semble donc qu’il faille désormais distinguer en fonction de la demande formulée par la victime du dol : – Si cette dernière sollicite la nullité : l’article 1138 du code civil s’applique et les seules manœuvres dolosives du mandataire suffisent à emporter la nullité, – Si cette dernière sollicite la réparation de son préjudice : en application des articles 1240 et 1241 du Code civil, la faute personnelle du mandant doit être caractérisée pour engager sa responsabilité civile.